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- 1 Nous renvoyons à l’étude de Philippe Dubois, « La question vidéo face au cinéma : déplacements est (...)
- 2 Jean-Paul Fargier, « Les effets de mes effets sont mes effets », Communications, no 48, « Vidéo », (...)
- 3 Philippe Dubois, Marc-Emmanuel Melon et Colette Dubois, « Cinéma et vidéo : interpénétrations », C (...)
- 4 Caroline Renouard, Les Effets esthétiques et narratifs de la technique de l’incrustation. L’image (...)
- 5 Edgar Morin, Le Cinéma ou l’Homme imaginaire. Essai d’anthropologie [1956], Paris, Minuit, 1977. (...)
- 6 Clément Rosset, Fantasmagories suivi de Le Réel, l’imaginaire et l’illusoire, Paris, Minuit, 2006. (...)
- 7 Clément Rosset, Fantasmagories suivi de Le Réel, l’imaginaire et l’illusoire, Paris, Minuit, 2006, (...)
- 8 Rosset fait ici référence aux Clefs pour l’imaginaire d’Octave Mannoni.
- 9 Nous pensons notamment à la formulation de Gérard Genette, quand il énonce que « Diviser (partager (...)
- 10 Edgar Morin, Introduction à la pensée complexe [1990], Paris, Seuil, 2005, p. 99.
1L’incrustation renvoie à une technique née de la volonté d’intégrer une image dans ou sur une autre ou d’assembler plusieurs éléments visuels ensemble, le résultat final proposant une image composite. L’incrustation vidéo (ou chroma-key) semble être déterminée par un dispositif a priori analogue à la définition même d’image composite (deux images pour n’en faire qu’une seule)1. Cependant, comme l’a souligné Jean-Paul Fargier2, elle est aussi caractérisée par ce rapport unique au direct, à l’instantané et à la simultanéité : les deux éléments conservent, au final, leurs propres autonomies, leurs « réalités indépendantes3 » dans l’image finale, permettant la réalisation de toutes sortes d’images qu’il est possible de modifier à sa guise. L’image composite vidéo peut cependant rejoindre certaines ambitions de l’image composite cinématographique : celles de tendre à dépasser la linéarité temporelle du montage traditionnel séquentiel et à favoriser un montage dans le plan. Bien au-delà de l’art vidéo, il s’agit surtout d’un dispositif de représentation visuelle qui se veut bien souvent illusionniste, puisqu’il permet de composer un espace homogène à partir d’éléments hétérogènes incrustés ensemble4. Ainsi, la particularité de l’image composite, comme effet spécial, est de représenter une apparence de la réalité, ou au contraire de vider l’image de toute une apparence de réalité. En nous accordant sur les réflexions d’Edgar Morin5 ou de Clément Rosset6, il semble que les liens entre réel et imaginaire ne soient pas conflictuels : « la perception du réel et la représentation imaginaire sont taillées dans la même toile7 » (en référence à l’expression de Shakespeare, dans La Tempête : « nous sommes faits de la même étoffe que les songes »). L’imaginaire ne serait qu’un réel « décalé » sur une « autre scène »8, par rapport à l’espace et au temps. L’image composite est une image paradoxale – une image fondamentalement baroque9, qui se compose sur les fondements de la décomposition, qui est à la fois une et multiple, réaliste et irréaliste. Ce serait même, pour reprendre le concept de complexité d’Edgar Morin, une image dialogique, puisque c’est une image qui assume son caractère contradictoire : « le principe dialogique nous permet de maintenir la dualité au sein de l’unité. Il associe deux termes à la fois complémentaires et antagonistes10 ». Autrement dit, le sens et la forme d’une image initiale sont détournés, mutilés, manipulés pour être remodelés, reconstruits, réunifiés avec d’autres fragments d’images pour composer une image composite finale. L’incrustation ou la superposition dans une même image de plusieurs images élémentaires et disparates va résulter une image finale complexe et aboutie.
- 11 Lev Koulechov, L’Art du cinéma et autres écrits, Lausanne, L’Âge d’homme, 1994, p. 52. Voir aussi (...)
2Nous avons choisi d’analyser la production d’une illusion paradoxale dans le film L’Anglaise et le Duc d’Éric Rohmer (2001). Ce film, de genre historique, met en avant – dans les séquences se déroulant en décors extérieurs – des images composites, à travers l’incrustation de comédiens dans des décors picturaux. Nous voyons ici la rencontre d’un corps (réel) avec un décor (une peinture numérisée), où le corps transmet, par contagion, les traces de sa réalité dans le décor irréel qui l’entoure, participant à la présence d’une géographie créatrice11 au sein même du plan. Nous observons une mise en tension dans le dispositif utilisé, puisque le spectateur sait d’emblée qu’il y a trucage. Ces plans truqués visibles comportent donc un enjeu supplémentaire, celui de créer du réalisme, ou plus précisément du vraisemblable, ce qui donne aux corps des personnages une place particulière, puisqu’ils se présentent comme les seuls éléments vrais du plan, mais aussi comme les seuls éléments étrangers au sein d’une image artificiellement composée.
- 12 Antoine de Baecque et Noël Herpe, Biographie d’Éric Rohmer, Paris, Stock, 2014, p. 446 sq.
- 13 Marie-Laure Guétin, « Des décors révolutionnés : le Pari(s) historique d’Éric Rohmer », in Laurenc (...)
- 14 Marie-Laure Guétin, « Des décors révolutionnés : le Pari(s) historique d’Éric Rohmer », in Laurenc (...)
- 15 Florence Bernard de Courville, « L’Anglaise et le Duc, le réel et le tableau », in Noël Herpe (dir (...)
3À la suite du dépôt des archives d’Éric Rohmer à l’IMEC – l’Institut mémoires de l’édition contemporaine – et grâce aux nombreux témoignages récoltés auprès des anciens collaborateurs du cinéaste, la fabrique de ce film atypique a été minutieusement explorée par Antoine de Baecque et Noël Herpe dans leur biographie consacrée à Rohmer12, qui présente notamment les nombreuses problématiques de préparation, production, postproduction, mais aussi d’exploitation et de réception critique auxquelles L’Anglaise et le Duc a été confronté. D’autres travaux universitaires ont plus spécifiquement mis en lumière les particularités esthétiques et narratives de ce film, comme l’étude de Marie-Laure Guétin, qui porte sur les « décors révolutionnés, le Paris(s) historique de Rohmer13 » où la picturalité du film est interrogée comme un « moyen de faire se rencontrer, sur une même scène, la narration, l’histoire et l’esthétique14 » ; ou bien encore l’article de Florence Bernard de Courville, qui évoque la déréalisation de la Révolution française par le recours à la représentation artificielle des décors15.
4Bien que nous nous inscrivions évidemment dans la continuité de ces travaux, notamment sur cette thématique centrale qu’est la mise en spectacle de l’histoire par le biais des décors picturaux, l’optique retenue ici concerne néanmoins davantage le questionnement induit par l’emploi de la technique de l’incrustation et de ses effets. Nous souhaitons ainsi comprendre comment l’effet de transparence, généralement observé dans l’usage des effets spéciaux visuels photoréalistes, a été ici détourné au profit d’un effet spectaculaire. Quid de l’effet de réel ? Que nous laisse voir l’hétérogénéité des matériaux de la fabrication et de la représentation d’un « point de vue » sur l’histoire ? Nous analyserons ainsi la manière dont les effets de sens de L’Anglaise et le Duc démontrent (consciemment ou non) le caractère ambigu de son dispositif visuel – entre illusions et désillusions – dans le fond comme dans la forme.
- 16 Grace Elliott, Journal de ma vie durant la Révolution française [1801], Paris, Max Chaleil, 2001. (...)
5L’Anglaise et le Duc d’Éric Rohmer (2001) est l’adaptation d’une œuvre littéraire méconnue, les Mémoires16 de Grace Elliott, une aristocrate anglaise qui vécut à Paris pendant la Révolution française. Éric Rohmer a utilisé dans cette œuvre de fiction (créée à partir d’un témoignage historique) un procédé esthétique réduit à sa plus simple expression, rappelant les dispositifs optiques de la lanterne magique et le cinéma des premiers temps. Néanmoins, pour y parvenir, le réalisateur a employé les nouvelles technologies du début du xxie siècle et tout particulièrement la technique de l’incrustation numérique. L’effet visuel qui en résulte place les comédiens dans des décors picturaux évoquant le Paris de la Révolution française. L’hybridation, dans le film de Rohmer, est poussée à l’extrême, à travers un récit doublement subjectif où les points de vue se superposent, tout comme les images.
6En effet, nous retrouvons, d’une part, le récit personnel relaté dans les Mémoires de cette jeune Anglaise, en retrait par rapport aux évènements révolutionnaires en raison de son statut d’étrangère, mais néanmoins partie prenante en tant qu’aristocrate. D’autre part, est présente la narration cinématographique de Rohmer, qui s’approprie l’histoire particulière de Grace Elliott pour en faire une œuvre fictionnelle originale. La grande histoire est représentée par le biais de l’incrustation de l’actrice qui interprète l’héroïne dans les décors picturaux, renforçant la distance de celle-ci avec les évènements. Ainsi, nous sommes face à un triple récit : celui de son auteur, Grace Elliott, et de son lecteur, Éric Rohmer, qui se placent comme des spectateurs de l’histoire et, enfin, le récit de l’histoire elle-même et de ses représentations picturales. Si Grace Elliot appréhende l’histoire de son point de vue particulier, Rohmer ne s’attache pas à reconstituer objectivement les évènements historiques. Il cherche au contraire par la fiction à refléter les sentiments de l’Anglaise. Malgré cette mise à distance de l’histoire défendue par le cinéaste, L’Anglaise et le Duc sera perçu par une partie du public et de la critique comme un film historique qui soutiendrait la cause royaliste.
- 17 Tom Gunning, « Éric Rohmer et l’héritage du réalisme cinématographique », in Noël Herpe (dir.), Ro (...)
7Ce film, comme bien d’autres, témoigne des tensions entre histoire et fictio, entre faits historiques et points de vue particuliers, et cela, paradoxalement, dans un domaine reposant souvent sur le spectaculaire et l’artifice. Rohmer a expérimenté dans L’Anglaise et le Duc une forme cinématographique dépassant les oppositions entre histoire et fictio grâce à son esthétique particulière et à son récit mêlant histoire écrite, mémoires et fiction. L’Anglaise et le Duc est une œuvre atypique dans la filmographie d’Éric Rohmer, tout comme La Marquise d’O… (1976) et Perceval le Gallois (1978) – notamment en raison des dispositifs de mise en scène utilisés, qui sont en rupture avec les procédés narratifs et esthétiques de ses autres films. Dans les trois œuvres, le cinéaste a utilisé des procédés de mise en image dans lesquels l’anachronisme et l’artifice sont mis en évidence. Hormis ces films, la filmographie de Rohmer s’inscrit dans la lignée de l’œuvre théorique d’André Bazin. D’ailleurs, pour le théoricien et le cinéaste, comme l’a décrit Tom Gunning, « le cinéma devrait être une forme d’art sollicitant une réalité “mise à nu”17 ». Bazin et Rohmer rêvaient d’un « degré zéro du style » au cinéma, loin des fioritures et des effets en tous genres. Et pourtant, quand on regarde La Marquise d’O…, Perceval le Gallois ou L’Anglaise et le Duc, on ne peut que constater un traitement formel d’une stylisation poussée à l’extrême. Concernant Perceval le Gallois, Tom Gunning a apporté une réponse pertinente à cette volonté, au premier abord curieuse – voire déstabilisante –, de l’un des cinéastes emblématiques de la Nouvelle Vague :
- 18 Tom Gunning, « Éric Rohmer et l’héritage du réalisme cinématographique », in Noël Herpe (dir.), Ro (...)
Le réalisme cinématographique n’est pas en adéquation absolue avec le vraisemblable, et il ne consiste pas non plus à rendre les choses plus vivantes ou plus dramatiques ; il s’attache plutôt à respecter le poids et la résistance à la fois du langage et des choses18.
- 19 Edgar Morin, Le Cinéma ou l’Homme imaginaire. Essai d’Anthropologie [1956], Paris, Minuit, 1977, p (...)
8L’intention de Rohmer était de reprendre à son compte des codes visuels et narratifs propres aux périodes historiques représentées dans ses films. Selon Rohmer, ce procédé était la seule façon de présenter avec réalisme les sujets historiques ou mythologiques : il ne représente pas le mensonge de la fiction par l’illusion du vraisemblable, mais il propose une représentation tellement empreinte d’artifice et d’irréalisme qu’il ne peut en surgir que la « vérité ». C’est, en quelque sorte, la formule mathématique du (-) · (-) = (+), ici : artifice · artifice = vérité, ou bien encore, subjectivité · subjectivité = objectivité. Ce concept approfondit, d’une certaine façon, une idée développée par Edgar Morin : « ce qu’il faut interroger précisément, c’est ce phénomène étonnant où l’illusion de réalité est inséparable de la conscience qu’elle est réellement une illusion, sans pourtant que cette conscience tue le sentiment de réalité19 ». Si le vraisemblable est l’opposé de la vérité, ce qui se rapprocherait le plus de cette dernière serait donc l’invraisemblable, notamment grâce à l’utilisation de l’image composite et de l’incrustation picturale artificielle d’un décor du Paris révolu. Loin de l’historia, Rohmer n’a pas cherché à montrer dans L’Anglaise et le Duc ce qui a réellement eu lieu, il a proposé comme sujet de son scénario une intrigue située au sein d’une période historique trouble dont il est difficile de percevoir encore de nos jours tous les tenants et aboutissants. Il a souhaité mettre en scène et présenter aux spectateurs de ce début de xxie siècle la « vérité » d’un témoin qui a vécu et subi des événements marquants de notre histoire.
- 20 Jean Tulard, « Une cruauté extraordinaire », Le Figaro, 12 septembre 2001.
9Le récit de Grace Elliott révèle le point de vue particulier d’une aristocrate sur les événements historiques de la Révolution. Ses Mémoires sont doublement subjectifs : il ne s’agit pas de raconter uniquement son histoire personnelle, mais surtout de défendre les positions du duc d’Orléans et de les justifier, alors même que Grace ne partageait pas ses positions politiques. En s’intéressant au point de vue de cette Anglaise royaliste modérée, Rohmer a voulu traduire dans son film la distance de ce témoin privilégié par rapport aux événements historiques. En ne cherchant pas à inscrire directement son film dans l’Histoire, mais en choisissant comme héroïne un personnage en marge de la Révolution française (tout comme D.W. Griffith l’avait aussi mise en scène à travers les péripéties de ses Deux orphelines en 1922), Rohmer a pris le parti de représenter indirectement un moment capital de la formation de l’identité française et de heurter, par là même, la sensibilité des spectateurs. En effet, parce qu’« il ne communie pas dans la mythologie de la Révolution française20 », une partie du public et quelques journalistes et historiens ont été déconcertés par le film, au point de voir dans Rohmer un partisan royaliste, comme Jean-François Kahn dans la revue Marianne :
- 21 Jean-François Kahn, « L’aveu de la haine du peuple », Marianne, 3 septembre 2001.
Il s’agit d’une vision néomonarchiste et donc foncièrement « contre-révolutionnaire » de cet évènement fondateur. L’émergence, de plus en plus visible, d’un courant anti-républicain dans le pays nous préparait à cette relecture « révisionniste », comme on dit, de notre épopée nationale. […] C’est que s’en dégage, comme on avait rarement osé l’exprimer jusqu’ici […] une haine féroce, implacable, terrible du peuple. […] Les chouchous du « haut » – Rohmer en est – disent ce qu’ils pensent vraiment du « bas ». Mélange d’exécration et de mépris21.
10Le réalisateur a défendu son point de vue dans la presse et même dans l’édition du DVD du film, où il a ressenti le besoin de s’expliquer une « bonne fois pour toutes » :
- 22 Éric Rohmer, L’Anglaise et le Duc [DVD], Pathé Vidéo, 2002.
Je n’ai pas fait ce film pour des raisons politiques, je n’y défends aucun parti, ni royaliste, ni anti-royaliste. En revanche, j’aimerais contribuer à entretenir chez le public, jeune ou vieux, le goût de l’Histoire. […] Il y a chez nous un grand intérêt potentiel pour l’Histoire, mais les films historiques se sont souvent montrés un peu désinvoltes à l’égard de la vérité historique. […] Ici, le récit de Grace Elliott était une base très complète, jusque dans ses dialogues22.
- 23 Philippe Petit, « Le film qui enterre 1789 », Marianne, 3 septembre 2001.
11L’utilisation de l’incrustation numérique a sans doute été en partie à l’origine de la polémique soulevée, car elle a été interprétée comme une mise en valeur esthétisante du point de vue de Grace Elliot. Le cinéma, pour Rohmer, est un art du présent. Il n’a pas cherché à reconstituer le passé dans son film, mais à proposer, grâce aux incrustations, un « présent » du passé. Le spectateur, mis à distance par l’artifice visuel de l’incrustation, peut adhérer ou non au point de vue de Grace, bien plus que dans un film où la mise en scène chercherait à maintenir à tout prix l’illusion mimétique, mais en ne laissant finalement aucune liberté au spectateur. Cependant, cette esthétique du décor pictural (presque) figé, et c’est ce qui sera finalement reproché au film par certains critiques, peut aussi – paradoxalement – ne permettre aucune issue à l’imagination, « comme si l’Histoire était jouée d’avance, comme s’il était inutile de l’interroger et de se resituer dans un présent-passé improbable et ouvert23 ».
12Le choix de combiner la vidéo numérique et le décor pictural est au premier abord curieux chez Rohmer, faisant osciller le film entre l’avant-garde et l’académisme. En réalité, il s’ancre parfaitement dans la finalité esthétique et narrative précise du film, qui permet de garder à distance les événements historiques. D’un côté, l’héroïne ne peut interagir avec son environnement (la peinture symbolisant le monde qui l’entoure), et d’un autre côté, c’est le spectateur qui est déconcerté par la révélation de l’artifice cinématographique, qui ne le place pas, pour une fois, face à une illusion de réel.
- 24 Le kinescopage est une technique consistant à reporter sur une pellicule film des images initialem (...)
- 25 Comme l’ont rappelé Antoine de Baecque et Noël Herpe, le cinéaste s’intéressait à l’incrustation d (...)
13Concrètement, Rohmer et son équipe ont mis en place le dispositif de réalisation suivant : les comédiens (filmés sur fond vert en Betanum) ont été incrustés dans des toiles peintes imitées du style artistique de l’époque révolutionnaire et représentant les grandes places parisiennes telles qu’on aurait pu les voir sous la Terreur. L’image a ensuite été kinescopée24 en 35 mm, apportant des aplats, des chatoiements, une patine des couleurs et du grain renforçant l’aspect pictural du film, rappelant les touches d’un pinceau sur une toile de la fin du xviiie siècle. Pendant dix ans, Rohmer a recherché en vain les moyens pour parvenir à ce rendu25. Il a dû attendre que les nouvelles technologies cinématographiques se développent suffisamment pour qu’elles servent au mieux le propos de son film sans perdre de la qualité d’image. De même, il a patienté le temps que les méthodes de kinescopage soient assez performantes, ce que la vidéo et la technologie numérique ont permis dès la fin des années 1990. Rohmer a expliqué ainsi son choix de l’incrustation :
- 26 Éric Rohmer, « J’aurais pu être beaucoup plus violent », entretien avec Antoine de Baecque et Jean (...)
Seul le numérique permettait cela. L’extérieur comme on le montre généralement ne m’intéresse pas. Je refuse ce genre de reconstitution idiote, cette pseudo-fidélité. Au cinéma, on n’a jamais vu le Paris ancien mais trop de décors destinés à le figurer. Paris a fait la Révolution et je voulais le montrer directement, en vue large, sans reconstitution, ni recadrage au tournage, ni recoupage au montage. Seule la technique de l’incrustation de personnages dans les tableaux d’époque pouvait concrétiser ce rêve. Il fallait que les acteurs sortent de la peinture ou de la gravure. Leur réalité est avant tout picturale26.
14Rohmer a inscrit ses personnages dans les plans du film comme un peintre le ferait dans des portraits. D’ailleurs, dans les scènes d’intérieur, il a placé aux murs de nombreuses toiles peintes, permettant de faire interagir les personnages avec leurs représentations picturales. Il introduit ses héros en s’attardant longuement sur leurs portraits peints à la mode du xviiie siècle. Les acteurs sont par ailleurs cadrés comme les portraits (c’est-à-dire en plan fixe, large et parfois rapproché) afin de renforcer les personnalités figées dans le temps et dans l’action de Grace et du Duc.
- 27 Pascal Bonitzer, Décadrages : peinture et cinéma, Paris, Cahiers du Cinéma/Étoile, 1987.
15D’après Pascal Bonitzer, le rapport le plus commun qu’entretiennent la peinture et le cinéma semble être le trompe-l’œil27. Le cinéma et la peinture, pour faire oublier la platitude de l’image, doivent faire ressentir à l’œil l’illusion de profondeur, grâce à certaines règles de perspective. D’ailleurs, la perspective elle-même est le fruit d’un artifice technique autant au cinéma que dans la peinture, comme l’a précisé Daniel Arasse :
- 28 Daniel Arasse, Histoires de peintures, Paris, Gallimard, 2006, p. 98 sq.
La fenêtre d’Alberti n’ouvre pas du tout sur le monde, ce n’est pas un détail du monde qu’on voit à travers cette fenêtre, c’est le cadre à partir duquel on peut contempler l’histoire. C’est le dessin rectangulaire de la surface qu’on va peindre, le cadrage, qui détermine toute perspective28.
16Dans L’Anglaise et le Duc, la présence des deux dispositifs de prise de vues, celui de la peinture et celui du tournage sur le plateau en fond vert, pose doublement la question de la perspective et de l’illusion de la profondeur. Éric Rohmer le cinéaste, et Jean-Baptiste Marot le « peintre-décorateur » des vues picturales du film, ont étudié le moyen pour articuler entre elles les deux perspectives afin d’apporter une continuité entre les acteurs incrustés et les décors picturaux :
- 29 Éric Rohmer, propos recueillis par Aurélien Ferenczi sur le DVD de L’Anglaise et le Duc, Pathé Vid (...)
On a fait des essais. Il fallait savoir comment les personnages pouvaient « rentrer » dans le décor. On a fait un essai avec des figurants passant sous un porche, et, ça marchait. Ensuite, il a fallu un peu d’adaptation, notamment quand la profondeur du décor était supérieure à celle du studio : la perspective de la rue Saint Honoré par exemple, devait atteindre deux cents mètres, alors que le plateau n’avait que quarante mètres de profondeur29.
17Pendant deux ans, ils ont donc élaboré trente-sept tableaux pour constituer les décors extérieurs du film le plus précisément possible, afin que chaque plan puisse donner l’illusion de posséder un espace de vision en trois dimensions de Paris. Ces décors ont été directement inspirés de toiles et de gravures prérévolutionnaires, exposées au musée Carnavalet de Paris, puisque ce sont les principales sources iconographiques du Paris de l’époque que nous possédons de nos jours. Par la suite, le point de vue du « peintre-décorateur » devait devenir le point de vue de la caméra.
- 30 Jean-Baptiste Marot, propos recueillis par Aurélien Ferenczi sur le DVD de L’Anglaise et le Duc, P (...)
18Il fallait définir très précisément l’emplacement et la focale de la caméra pour chaque plan extérieur. Éric Rohmer devait donc connaître les déplacements de mouvements de tous les personnages pour définir les entrées et les sorties de champ et pour définir le cadre du tableau30. Les décors intérieurs ont été eux aussi réfléchis en fonction de l’esthétique picturale voulue par le cinéaste : tout est construit autour de toiles peintes collées en trompe-l’œil à des parois amovibles (découvertes), apportant ainsi une matière très dense à l’image, extrêmement proche des peintures extérieures.
- 31 Voir Réjane Hamus-Vallée et Caroline Renouard, « La peau grise. Analyse comparative de trois procé (...)
- 32 Buf Compagnie, aidée par les structures de tournage de Duboi, a réalisé toutes les incrustations e (...)
19Diane Baratier, la chef opératrice de Rohmer, a dû apprendre à travailler de façon très différente avec les procédés numériques pour L’Anglaise et le Duc. Tout d’abord avec la caméra Betacam numérique : celle-ci permettait de nouveaux réglages, notamment colorimétriques, ce qui a donné aux images les tons chatoyants et patinés qui correspondaient aux couleurs employées dans les peintures des décors extérieurs, ainsi que dans les décors intérieurs. Le tournage sur fond vert nécessite aussi une grande maîtrise des couleurs et de la lumière, puisqu’il faut toujours prêter attention à la teinte de la peau des acteurs, où le vert du fond se réfléchit31. Il faut donc pallier ce défaut en trouvant la parfaite exposition lumineuse. Diane Baratier a travaillé avec un diaphragme très fermé, afin de bénéficier d’une importante profondeur de champ, permettant de compenser l’aspect lisse que peut apporter le numérique. La composition scénique et l’interprétation des acteurs pouvaient dès lors être inspirées des œuvres picturales de la fin du xviiie siècle, impliquant un jeu volontairement contraint, à l’étroit dans les carcans du cadrage de l’image et accentuant in fine l’impuissance des personnages prisonniers de leurs statuts sociopolitiques et des événements incontrôlables de la Terreur. Diane Baratier a dû ensuite assimiler les différents regards, celui de Rohmer tout d’abord, ceux du peintre et des tableaux ensuite, et enfin celui de la caméra qui devait être placée sur des axes prédéterminés, pour que les différentes perspectives s’accordent avec les objets et les mouvements des acteurs à l’écran. Elle est parvenue à « cadrer » la scène et les comédiens sur fond vert, en se repérant grâce à des rayons laser projetés sur le sol et des marques vertes matérialisant les volumes qui occuperaient ensuite l’espace des tableaux (rues, pont, bâtiments, places…). Après le tournage, pendant le travail d’incrustation en postproduction32, elle a ajouté dans certaines vues des éléments animés pour apporter encore plus d’effets de réel aux scènes, mais aussi, de vie et d’espace au cadre : des oiseaux s’envolent dans le ciel, la Seine miroite, etc.
- 33 Éric Rohmer, « Je voulais que la réalité devienne tableau », entretien avec Patrice Blouin, Stépha (...)
20Ainsi, les incrustations ont finalement été utilisées par Rohmer pour donner cette impression d’extériorité à l’histoire qui est propre au récit de Grace Elliott, permettant ainsi à la fictio de prendre forme et à la vérité – telle qu’il la conçoit – de surgir. C’est justement par l’imaginaire pictural et sa mise en forme cinématographique que Rohmer recherche ces résultats. L’artifice devient le réel : « Ce n’est pas le tableau qui entre dans la réalité. C’est au contraire le tableau qui devient réel33. »
- 34 Éric Rohmer, entretien avec Jean-Michel Frodon, Le Monde, 5 septembre 2001.
Mon objectif était de renforcer l’impression de vérité. Dans la mesure où je montre des toiles peintes, je voulais établir ce parti pris d’emblée. […] L’artificialité de la peinture a été dictée par la recherche de la vérité […] je trouve que le style des peintures, la lumière des peintures recèlent une vérité, celle que je cherche. Peut-être pas une vérité historique, mais une vérité artistique34.
21D’un point de vue cinématographique, ce que Rohmer a cherché à reproduire à travers cette mise en forme visuelle n’est ni le fait historique, qui dans le film fonctionne comme une toile de fond – au sens propre du terme –, ni un jugement sur les événements. L’anachronisme de ces images, mis en avant par un système technique d’incrustation mêlant passé et présent, répond au projet du cinéaste : être spectateur du spectacle de l’histoire.
22Cette distance est présente au sein du film par la technique de l’incrustation, mais également par des dispositifs qui apparaissent à l’écran. Un exemple précis de mise à distance de l’histoire par l’intermédiaire d’un appareillage technique est la séquence où Grace Elliot refuse de prendre part au « spectacle » de l’exécution du roi, et laisse le soin à sa servante de regarder la scène à travers une lunette et de lui raconter ce qu’elle voit. Le lieu d’observation choisi par Grace et sa servante lors de l’exécution du roi n’est pas anodin : elles se trouvent sur une sorte de terrasse, un belvédère qui prend place dans la petite ville de Meudon et qui donne un « point de vue » sur tout Paris. Elles sont au balcon du théâtre de l’histoire. Comme l’explique Danièle Heymann à propos de cette scène :
- 35 Danièle Heymann, « La révolution sur le visage d’une femme », Marianne, 3 septembre 2001. (...)
« Je ne vois qu’un peu de bleu et de rouge » dit [la servante]. On entend les roulements assourdis des tambours. C’est tout, et l’Histoire passe sur le visage d’une femme. C’est exactement là que Rohmer voulait nous mener35.
23Les événements représentés par des plans larges en profondeur, saisis depuis un point de vue monoculaire (comme la scène du belvédère) et bien entendu le décor pictural, participent à la distance recherchée par le cinéaste. Cette distance, d’après le cinéaste, est nécessaire à la découverte du sentiment de vérité, celui que peut ressentir le spectateur en réponse aux événements vécus par Grace Elliott. Le cinéaste rappelle que les films historiques ne sont qu’un spectacle : il narre une histoire dans l’Histoire, il jongle avec les cadres cinématographiques et picturaux et prend un malin plaisir à déconcerter le spectateur, qui peut parfois se demander s’il regarde une œuvre peinte d’époque ou un film :
- 36 Éric Rohmer, propos recueillis par Aurélien Ferenczi sur le DVD de L’Anglaise et le Duc, Pathé Vid (...)
Le film commence par des tableaux et j’aimerais qu’un spectateur non averti s’imagine qu’il s’agit de documents d’époque, et soit surpris de voir ces tableaux s’animer36.
- 37 Comme l’a expliqué la directrice de production Françoise Etchegaray, ce que recherchait Rohmer en (...)
24Les événements historiques représentés, ainsi que la présence tangible et mémorielle de la peinture – forme par laquelle les images de la Révolution française nous sont restituées – participent à la distance picturale souhaitée par le cinéaste37. Éric Rohmer, en ayant recours à des incrustations aussi visibles que celles qu’il a employées, a espéré donner encore davantage un effet de vérité au dispositif, et donc, au récit même du film.
- 38 André Bazin, Qu’est-ce que le cinéma [1958], Paris, Cerf, 2011, p. 59.
- 39 Réjane Hamus-Vallée, La Fabrique du cinéma : du trucage aux effets spéciaux, thèse de doctorat sou (...)
- 40 Réjane Hamus-Vallée, La Fabrique du cinéma : du trucage aux effets spéciaux, thèse de doctorat sou (...)
25Les effets spéciaux visuels ne produisent pas que du simulacre et ne visent pas uniquement à faire du sensationnel et de l’artifice. Paradoxalement, une technique comme l’incrustation peut apporter un même effet de vérité à l’image que celui décrit par Bazin dans le montage interdit et sa formule maintenant canonique de « robe sans couture de la réalité » : « Quand l’essentiel d’un événement est dépendant d’une présence simultanée de deux ou plusieurs facteurs de l’action, le montage est interdit38. » Bazin considère que le but de n’importe quel film (de fiction ou documentaire) est de provoquer chez le spectateur l’illusion d’assister à des événements réels, se déroulant devant lui comme dans la réalité quotidienne. Cette illusion est néanmoins une supercherie, puisque la réalité n’existe, pour nous, spectateurs, que dans un espace physique concret et temporel continu. C’est l’unité du cadre qui prime et, par conséquent, par le biais d’un jeu de superposition de « plans » à l’intérieur d’une même image (d’un même cadre), l’effet de réel – sous-jacent au sentiment de vérité voulu par Rohmer et garant d’une forme de réalité de l’action présentée – va pouvoir être pleinement exploité. Rohmer a ainsi recours à l’intérêt premier de l’incrustation et de l’image composite : le respect unitaire du cadre, même si cette homogénéité est recréée artificiellement. « Seul le cadre est le garant de l’unité des effets spéciaux39 », a expliqué Réjane Hamus-Vallée. Ce principe de « confrontation » de plusieurs actions temporelles dans un même espace implique « que la réalité de l’un contamine l’irréalité de l’autre, et inversement »40.
- 41 Edgar Morin, Introduction à la pensée complexe [1990], Paris, Seuil, 2005.
- 42 Gérard Genette, Palimpsestes, La littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982. Gérard Genette e (...)
- 43 Hans Belting, Pour une anthropologie des images [2001], Paris, Gallimard, 2004, p. 93.
26Pour conclure, l’image composite dans ce film est paradoxale, car elle se présente à la fois comme illusionniste et désillusionniste. Elle est construite en un assemblage de diverses formes de représentation, de formes stylistiques, de narrations, de valeurs, qui se grefferaient entre elles et développeraient d’elles-mêmes un nouveau discours, une nouvelle complexité41. Les récits intrinsèques aux films spectaculaires reposant sur les images composites seraient comme des hypertextes qui nous amèneraient à lire entre les lignes – à lire entre les couches d’images. Tout comme la transtextualité décrite par Gérard Genette42, où s’inscrit l’hypertexte, l’utilisation de l’image composite peut servir à mettre une image en relation avec d’autres images, les couches successives d’image apparaissant en filigrane, que ce soit dans le fond comme dans la forme. Le dispositif de l’image composite peut être utilisé comme une forme de palimpseste, pour des films de genre historique s’inscrivant dans une dynamique se situant entre passé et présent. Elle répond de ce fait à la complexité de l’histoire qui, comme la pensée complexe de Morin, ne possède pas de linéarité et donne lieu à des couches dynamiques d’espaces, de temps et de points de vue qui se démultiplient et se relient. L’Anglaise et le Duc est un film composite qui, à travers la technique de l’incrustation, accumule des épaisseurs d’images et de récits, tout autant conscients et inconscients, qui se situent entre histoire et spectacle, entre passé et présent, entre visible et invisible. Le « fond » historique, présent ici au propre comme au figuré est, incontestablement, trop peu fiable pour que le réalisateur ait fait le choix d’une représentation réaliste des décors. En effet, les références et inspirations esthétiques et narratives qui construisent ce film révèlent sans cesse la présence d’images médiales du passé (des « images musées43 ») derrière l’apparente image physique composite. Le film met en image des « fragments » de mémoire, de points de vue et de récits spectaculaires qui se superposent à la façon d’un palimpseste. La quête de vérité, comme l’a souhaitée Rohmer dans L’Anglaise et le Duc, semble donc avoir été motivée par la création et la perception d’un espace chimérique à « double fond », entre artifice et réalité, entre (dés)illusions du passé et du présent.
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Bibliography
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Filmographie – multimédia
DVD L’Anglaise et le Duc, Pathé Vidéo, 2002.
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Notes
Nous renvoyons à l’étude de Philippe Dubois, « La question vidéo face au cinéma : déplacements esthétiques », in Franck Beau, Philippe Dubois et Gérard Leblanc (dir.), Cinéma et dernières technologies, Paris/Bruxelles, INA/De Boeck Université, 1998, p. 198 sq.
Jean-Paul Fargier, « Les effets de mes effets sont mes effets », Communications, no 48, « Vidéo », 1988, p. 93 sqq. Voir aussi Jean-Paul Fargier, « L’homme incrusté », Cahiers du cinéma, no 328, supplément spécial « Télévision », automne 1981, p. 60 sq.
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Clément Rosset, Fantasmagories suivi de Le Réel, l’imaginaire et l’illusoire, Paris, Minuit, 2006.
Clément Rosset, Fantasmagories suivi de Le Réel, l’imaginaire et l’illusoire, Paris, Minuit, 2006, p. 105.
Rosset fait ici référence aux Clefs pour l’imaginaire d’Octave Mannoni.
Nous pensons notamment à la formulation de Gérard Genette, quand il énonce que « Diviser (partager) pour unir, c’est la formule de l’ordre baroque. N’est-ce pas celle du langage même ?», Gérard Genette, Figures 1, Paris, Seuil, 1966, p. 38.
Edgar Morin, Introduction à la pensée complexe [1990], Paris, Seuil, 2005, p. 99.
Lev Koulechov, L’Art du cinéma et autres écrits, Lausanne, L’Âge d’homme, 1994, p. 52. Voir aussi Dominique Château, « Le montage comme expérimentation », CinémAction, n° 72, « Les conceptions du montage », 1994, p. 35.
Antoine de Baecque et Noël Herpe, Biographie d’Éric Rohmer, Paris, Stock, 2014, p. 446 sq.
Marie-Laure Guétin, « Des décors révolutionnés : le Pari(s) historique d’Éric Rohmer », in Laurence Schifano et Sylvie Robic (dir.), Rohmer en perspectives, Nanterre, Presses Universitaires de Paris-Ouest, « L’œil du cinéma », 2014, p. 71 sq.
Marie-Laure Guétin, « Des décors révolutionnés : le Pari(s) historique d’Éric Rohmer », in Laurence Schifano et Sylvie Robic (dir.), Rohmer en perspectives, Nanterre, Presses Universitaires de Paris-Ouest, « L’œil du cinéma », 2014, p. 73.
Florence Bernard de Courville, « L’Anglaise et le Duc, le réel et le tableau », in Noël Herpe (dir.), Rohmer et les autres, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, « Le Spectaculaire », 2007, p. 169 sq.
Grace Elliott, Journal de ma vie durant la Révolution française [1801], Paris, Max Chaleil, 2001.
Tom Gunning, « Éric Rohmer et l’héritage du réalisme cinématographique », in Noël Herpe (dir.), Rohmer et les autres, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, « Le Spectaculaire », 2007, p. 12.
Tom Gunning, « Éric Rohmer et l’héritage du réalisme cinématographique », in Noël Herpe (dir.), Rohmer et les autres, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, « Le Spectaculaire », 2007, p. 18.
Edgar Morin, Le Cinéma ou l’Homme imaginaire. Essai d’Anthropologie [1956], Paris, Minuit, 1977, préface de la nouvelle édition.
Jean Tulard, « Une cruauté extraordinaire », Le Figaro, 12 septembre 2001.
Jean-François Kahn, « L’aveu de la haine du peuple », Marianne, 3 septembre 2001.
Éric Rohmer, L’Anglaise et le Duc [DVD], Pathé Vidéo, 2002.
Philippe Petit, « Le film qui enterre 1789 », Marianne, 3 septembre 2001.
Le kinescopage est une technique consistant à reporter sur une pellicule film des images initialement tournées en vidéo.
Comme l’ont rappelé Antoine de Baecque et Noël Herpe, le cinéaste s’intéressait à l’incrustation depuis 1990, quand il avait incrusté dans une première image une autre image, représentant Arielle Dombasle, pour le clip Amour symphonique. Antoine de Baecque et Noël Herpe, Biographie d’Éric Rohmer, Paris, Stock, 2014, p. 429 sq.
Éric Rohmer, « J’aurais pu être beaucoup plus violent », entretien avec Antoine de Baecque et Jean-Marc Lalanne, Libération, 7 septembre 2001.
Pascal Bonitzer, Décadrages : peinture et cinéma, Paris, Cahiers du Cinéma/Étoile, 1987.
Daniel Arasse, Histoires de peintures, Paris, Gallimard, 2006, p. 98 sq.
Éric Rohmer, propos recueillis par Aurélien Ferenczi sur le DVD de L’Anglaise et le Duc, Pathé Vidéo, 2002.
Jean-Baptiste Marot, propos recueillis par Aurélien Ferenczi sur le DVD de L’Anglaise et le Duc, Pathé Vidéo, 2002.
Voir Réjane Hamus-Vallée et Caroline Renouard, « La peau grise. Analyse comparative de trois procédés d’incrustation cinématographique », in Priska Morrissey et Emmanuel Siety (dir.), Actes du colloque Filmer la peau, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, « Le Spectaculaire », en cours de publication.
Buf Compagnie, aidée par les structures de tournage de Duboi, a réalisé toutes les incrustations et autres effets visuels du film, mobilisant dix graphistes entre juillet et décembre 2000. Voir notamment Antoine de Baecque et Noël Herpe, Biographie d’Éric Rohmer, Paris, Stock, 2014, p. 434 sq.
Éric Rohmer, « Je voulais que la réalité devienne tableau », entretien avec Patrice Blouin, Stéphane Bouquet et Charles Tesson, Cahiers du cinéma, juillet/août 2001.
Éric Rohmer, entretien avec Jean-Michel Frodon, Le Monde, 5 septembre 2001.
Danièle Heymann, « La révolution sur le visage d’une femme », Marianne, 3 septembre 2001.
Éric Rohmer, propos recueillis par Aurélien Ferenczi sur le DVD de L’Anglaise et le Duc, Pathé Vidéo, 2002.
Comme l’a expliqué la directrice de production Françoise Etchegaray, ce que recherchait Rohmer en recourant aux effets spéciaux numériques « ressemblait davantage à un esprit d’enfance : des tableaux animés, à la manière des lanternes magiques », Antoine de Baecque et Noël Herpe, Biographie d’Éric Rohmer, Paris, Stock, 2014, p. 434. Cette influence esthétique de la lanterne magique est particulièrement bien mise en « lumière » dans le menu du DVD du film, puisque ce dispositif de projection est directement représenté dans l’animation multimédia du support.
André Bazin, Qu’est-ce que le cinéma [1958], Paris, Cerf, 2011, p. 59.
Réjane Hamus-Vallée, La Fabrique du cinéma : du trucage aux effets spéciaux, thèse de doctorat sous la direction de Jean-Louis Leutrat, Paris, Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3, 2002, p. 393.
Réjane Hamus-Vallée, La Fabrique du cinéma : du trucage aux effets spéciaux, thèse de doctorat sous la direction de Jean-Louis Leutrat, Paris, Université Sorbonne-Nouvelle Paris 3, 2002, p. 393.
Edgar Morin, Introduction à la pensée complexe [1990], Paris, Seuil, 2005.
Gérard Genette, Palimpsestes, La littérature au second degré, Paris, Seuil, 1982. Gérard Genette emploie le palimpseste au figuré pour désigner l’« hypertexte » (qui s’intègre dans l’étude plus globale de la transtextualité), qui met un texte en relation avec d’autres textes, les couches inférieures du texte transparaissant en filigrane.
Hans Belting, Pour une anthropologie des images [2001], Paris, Gallimard, 2004, p. 93.
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